La semaine du 27 au 30 août, se déroula la 9e édition de Ludovia, semaine de l’université d’été de l’e-éducation. Un évènement majeur pour le lobbying de Microsoft, qui cible depuis plusieurs années l’Éducation nationale.
Ci-après voici donc “Enquête et infographie” pour tout savoir des campagnes d’influence du marchand de logiciels en direction des écoles de la République.
Bonne rentrée.
Cette 9e édition de Ludovia a réunit professeurs, chercheurs mais aussi politiques, jusqu’au ministre de l’Éducation nationale Vincent Peillon, qui participera à une conférence. Parmi les partenaires de l’événement, Microsoft, le géant américain du logiciel.
En France, la firme de Redmond mène une intense campagne d’influence en direction des acteurs de l’éducation nationale, que nous avons reconstituée dans une [infographie à découvrir au bas de cet article].
La présence de Microsoft à Ludovia résume parfaitement sa stratégie qui consiste à se construire une légitimité pédagogique pour vendre des produits pour le moins controversés – prix élevé, logique propriétaire, volonté hégémonique, qualité contestable.
>>> Source & plus d’infos sur : http://owni.fr/2012/08/27/microsoft-programme-lecole/
>>> Ci-après quelques extraits intéressants :
Ce qui les intéresse, c’est les décisionnaires politiques qui se déplacent sur les événements : à Orléans en juin, au Forum des Enseignants Innovants et de l’Innovation éducative, il y avait tout le staff de Peillon.
IIs font du lobbying surtout auprès du ministère. Les responsables du ministère de l’Éducation nationale ont beaucoup d’invitations : formations, réunions pédagogiques, etc.
Le mot-clé pour mener cette campagne d’influence : innovation. Microsoft s’associe, sponsorise, voire initie des projets touchant à la pédagogie dès lors qu’ils qui se veulent innovants. Clé de voute de cette stratégie, le programme international Microsoft Partners in Learning (PIL), doté d’un budget de 500 millions de dollars sur dix ans. Car Microsoft a les moyens de son lobbying.
Partenariat public-privé
Microsoft cajole de tels chevaux de Troie pour mieux convaincre le seul acteur qui compte au final sur son chiffre d’affaires : le décisionnaire politique. Avec succès puisque une convention de partenariat a été signée avec l’Éducation nationale en 2003 et reconduite depuis. Microsoft n’est d’ailleurs pas le seul : Apple, Dell, Hewlett Packard, etc, en ont aussi signé une.
Un tel accord, c’est un sésame pour vendre ses produits en offrant la caution et la visibilité de l’instance supérieure en France en matière d’éducation. Il assure des tarifs très préférentiels aux établissements de l’Éducation nationale et aux collectivités territoriales qui, en France, gèrent les écoles primaires (commune), les collèges (conseil général) et les lycées (région) : “plus de 50%”.
Ces réductions sont d’autant plus bienvenues que les finances locales font grise mine et Microsoft surfe dessus. L’heure est au partenariat public-privé, et l’éducation est également séduite par ces délégations au profit du secteur privé. Extrait du texte de présentation de la page “collectivités territoriales” de Microsoft éducation :
Ces projets soutiennent l’évolution de l’École destinée aux élèves nés au XXIe siècle mais s’inscrivent également dans une démarche de rationalisation des dépenses publiques notamment éducatives. Vous voulez initier un projet nouveau et porteur en termes d’usages et d’images, contactez-nous !
L’Éducation nationale tire aussi la langue et Microsoft joue le généreux oncle d’Amérique :
Les journées de l’innovation à l’Unesco sont largement financées par Microsoft, par exemple. Le ministère de l’Éducation nationale n’a plus les moyens de faire ça, d’avoir cette vitrine, ça nous permet d’avoir des forums, des réunions, des formations, Microsoft s’engouffre dans la brèche. Tout le monde y trouve son compte, profs et ministère.
Pro Microsoft
Certains partisans du libre estiment que l’Éducation nationale est devenue “pro Microsoft”, ce dont elle se défend …
C’est par exemple sur le territoire neutre du siège de Microsoft à Issy-les-Moulineaux que les inspecteurs de l’Éducation nationale chargés de mission nouvelles technologies (IEN-TICE), conseillers techniques des inspecteurs d’académie, avaient été convoqués par l’Éducation nationale l’automne dernier, dans le cadre de leurs journées annuelles, comme s’en étaient émus l’April, une association de défense du logiciel libre, et Framasoft, un site dédié au libre. Une demi-journée de réunion au cours de laquelle leur ont été présentés des produits du fabricant.
Et contrairement à la Grande-Bretagne où le Becta, qui conseille le gouvernement en matière de TICE, avait déconseillé Windows Vista et Microsoft Office 2007, on n’entend pas de critiques de front. A contrario, le ministère souligne qu’il a mis en place Sialle, le “service d’information et d’analyse des logiciels libres éducatifs” et “favorise l’interopérabilité et l’ouverture des systèmes d’informations.”
Dans son entreprise de drague, Microsoft a l’intelligence d’avancer avec des mocassins plutôt qu’avec des gros sabots.
Le résultat commercial sonnant et trébuchant, on ne le connaîtra pas : Microsoft refuse de les divulguer en arguant de la concurrence. Concernant les tarifs, le flou est de mise. Si l’accord cadre parle de 50% de réduction, d’autres offres sont proposées. Par exemple Office professionnel pro 2010 est à 8 euros au lieu de… 499 euros. Version PC et pas Mac. Un sacrifice apparent : les enseignants sont autorisés à l’utiliser chez eux, ce qui peut les inciter à vouloir le même environnement de travail à l’école, ce qui se traduit en licences site annuelles juteuses.